Bison d'Amérique

Publié le par François Hameau

Bison d'Amérique

Bovidé sauvage des grandes plaines d’Amérique du Nord. Indissociable de la culture des Indiens des Plaines qui tiraient de la chasse au bison l’essentiel de leurs ressources, il a été, à la fin du XIXè siècle, très près de l’extinction.

Mammifère artiodactyle, le bison américain (bison bison) est le plus gros animal du continent américain. Haut de 1,80 m au garrot, certains mâles peuvent dépasser une tonne. Caractérisé par son aspect massif, il présente une bosse sur le garrot. Le poil qui recouvre la tête, le cou et les pattes avant est plus long et plus sombre que celui du reste du corps. Les cornes sont courtes, pointues et recourbées vers l’avant. La femelle est plus petite que le mâle. Elle donne naissance à un seul petit après une période de gestation de neuf mois. Le petit, que sa mère allaite pendant un an, présente un poil plus roux que celui des adultes, mais au bout de quelques semaines, il acquiert sa couleur définitive.

Répartition

Avant l’invasion du continent américain par les Européens, le bison occupait une grande partie de l’Amérique du Nord. A l’ouest, il atteignait les premiers contreforts des Montagnes Rocheuses. A l’est, quelques troupeaux vivaient dans les prairies verdoyantes situées entre les Appalaches et la côte. On trouvait des bisons dans le nord du Sonora, au Mexique. Mais le domaine de prédilection du bison était la Grande Prairie, l’océan d’herbe qui s’étend au centre du continent. On a estimé leur nombre, au début du XIXè siècle, à environ soixante millions.

Le bison et les Indiens

Le bison est indissociable de la culture des Indiens des Plaines. Avec le cheval et le tipi, il en est le trait le plus caractéristique.

Les Indiens chassaient le bison probablement depuis des millénaires. Dépourvus de chevaux, ils le traquaient à pied. Ils poussaient les troupeaux vers des falaises abruptes d’où les animaux tombaient et se tuaient, ou bien ils les dirigeaient vers des enclos dans lesquels ils les abattaient à l’arc ou à la lance.

Avec l’apparition du cheval, les tribus indiennes se sont déplacées en grand nombre vers les plaines à bisons. Ils ont pu alors mener des chasses plus faciles, mais aussi plus sélectives, ne tuant que le nombre de bêtes nécessaire. Pour les Indiens des Plaines, l’association cheval-bison est devenue un trait culturel majeur.

Le bison fournissait aux Indiens pratiquement tout ce qui était nécessaire à leur vie. La peau, soigneusement tannée par les femmes en utilisant la cervelle et la moelle, servait à recouvrir les tipis et à fabriquer des couvertures confortables, des vêtements et des sacs solides. Le cuir de l’encolure, particulièrement épais et résistant, fournissait les boucliers.

La viande, maigre et riche en protéines, pouvait être consommée fraîche, rôtie ou bouillie, associée à des légumes ou des fruits sauvages. Le plus souvent coupée en tranches minces et séchée au soleil, puis réduite en poudre et mélangée à de la graisse et à des fruits, la viande de bison constituait une conserve très nourrissante qui permettait aux familles indiennes de tenir durant les longs et rigoureux hivers de la Prairie.

Aucune partie de l’animal n’était négligée. Les cornes devenaient des louches, les poils tressés de la ficelle, les tendons, des cordes d’arc ou du fil à coudre. Avec les sabots bouillis, on faisait de la colle. Avec la vessie et les intestins, on fabriquait des outres pour transporter l’eau. Avant que les Indiens n’acquièrent des ustensiles de métal auprès des Blancs, c’est l’estomac du bison qui servait de marmite : un estomac rempli d’eau était suspendu à un trépied ; on y mettait alors des pierres brûlantes, ce qui portait rapidement l’eau à ébullition, permettant d’obtenir de l’eau chaude ou de faire cuire la viande. Selon leur taille et leur dureté, les os se transformaient en aiguilles, pelles, couteaux, grattoirs, pointes de flèches, casse-tête, ornements vestimentaires ou instruments de musique. La bouse séchée servait de combustible dans des régions souvent dépourvues de bois.

Les Indiens des Plaines considéraient l’esprit du bison comme l’une des plus puissantes manifestations du Grand Esprit. Pour les Sioux-Lakotas, le bison était la représentation terrestre du pouvoir du soleil.

La chasse au bison

Les colons européens qui traversaient les Plaines ont chassé le bison d’abord pour leur consommation. Puis les bisons ont été abattus pour nourrir les équipes de travailleurs qui construisaient les voies ferrées. On a parié sur celui qui abattrait le plus de bisons en un temps donné. C’est à ce jeu que s’est illustré William F. Cody et qu’il a gagné son surnom de Buffalo Bill. Le nombre des bisons semblait infini. Il arrivait que des trains soient, pendant des heures, bloqués par le passage des troupeaux de bisons. Vers 1870, des chasses "sportives" ont fait leur apparition. Le sport consistait souvent pour les voyageurs à abattre les bisons par la fenêtre d’un train. Des présidents, des princes venant d’Europe prenaient plaisir à ces chasses.

Les bisons ont été massacrés pour leur peau, pour leur langue, morceau de choix. On laissait des milliers de tonnes de viande pourrir sur les prairies. Les Indiens, dont la vie matérielle et spirituelle dépendait du bison, se sont inquiétés, puis indignés, puis révoltés.

"D'abord régler leur compte aux bisons"

Les généraux américains ont vite compris que la disparition des bisons entraînerait rapidement celle des Indiens libres. La chasse au bison, devenue une machine de guerre, a été fortement encouragée au plus haut niveau. Il s’agissait de "détruire l’intendance des Indiens".

Dès 1867, le général William T. Sherman définissait ainsi la politique indienne des Etats-Unis : "D’abord, régler son compte au bison ... Ensuite, régler leur compte aux Indiens. ... Les concentrer dans des réserves". En 1874, il précisait, en parlant des chasseurs de bisons : "Qu’on les laisse tuer et écorcher les bisons jusqu’à ce qu’il n’y en ait plus, puisque c’est là le seul moyen d’apporter une paix durable et de permettre à la civilisation de progresser dans ce pays". Les Cheyennes, Kiowas, Comanches et Arapahos mouraient de faim sur les réserves du Territoire Indien, tandis que des chasseurs blancs poursuivaient le massacre des bisons dans les Plaines du Sud. Vers 1875, le grand troupeau du sud marquait un net déclin. En 1878, il était entièrement anéanti. Au début des années 1880, les bisons avaient pratiquement disparu des Plaines du Nord.

Pour les Indiens, le traumatisme causé par cette disparition était immense. Ils n’avaient pas seulement perdu le moyen de mener leur vie libre de chasseurs, mais leur univers spirituel s’était effondré, le monde avait perdu son sens.

Sauvés de l'extinction

En 1883, le bison est réputé totalement éteint en Amérique du Nord. Quelques dizaines de bêtes ont cependant été retrouvées dans des lieux isolés à la fin du siècle, permettant à l’espèce d’être sauvée d’extrême justesse.

En 1894, quelques bisons étaient installés sur le Parc National de Yellowstone, au Wyoming. En 1902, le Congrès accordait cinquante mille dollars pour la protection et le développement de ce troupeau. Quelques années plus tard, le président Theodore Roosevelt créait la "National Bison Range" au Montana, sur la réserve Flathead, menant une action de protection très efficace.

Aujourd’hui, si les bisons ne sont que quelques milliers au Canada, où le climat est trop froid et humide, ils sont environ 50 000 aux Etats-Unis. La plupart vit dans des parcs nationaux où leur nombre augmente rapidement, créant des problèmes de surpâturage et d’évasions. Les gardes des parcs doivent en abattre tous les ans plusieurs centaines. Le troupeau du parc de Yellowstone a connu, durant l’hiver 1997, un premier abattage massif d’environ 1200 bisons. L’hiver 2007 a vu disparaître 1900 bêtes. C’est la plus grande tuerie de bisons depuis les grands massacres du XIXè siècle, font remarquer les Indiens qui sont venus protester et prier pour les bisons morts, la "nation bison", comme ils disent. Ces abattages sont demandés par les autorités du Montana qui craignent que, si des bisons sortent du parc, ils transmettent la brucellose à leurs troupeaux. Le troupeau de bisons du parc de Yellowstone a été ainsi réduit de près de la moitié.

Se réapproprier le bison

Depuis quelques années, les Indiens veulent réimplanter les bisons sur leurs réserves. Des associations indiennes qui regroupaient au début des années 2000 plus de quarante nations des Plaines, du Sud-Ouest et d’Oklahoma, aident à l’achat, au transport et à la gestion des troupeaux. Les Indiens demandent, généralement sans succès, que les bisons en surplus sur les parcs leur soient donnés.

La réappropriation du bison par les Indiens est un élément déterminant de la renaissance de leur culture et de leur spiritualité. Ils comptent également en tirer un bénéfice économique, d’abord pour leur consommation interne, puis par la commercialisation des peaux et de la viande, excellente, diététique et parfaitement naturelle.

Le massacre des bisons

Le massacre des bisons

Pile de crânes de bison (1873)

Pile de crânes de bison (1873)

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